nuit et brouillard



En fouillant, l'été dernier, dans la bibliothèque paternelle, j'ai mis la main sur La trêve de Primo Levi. Ce livre, j'en avais entendu parlé et j'avais envie de le lire depuis un moment. J'avais lu, il y a quelques années, Si c'est un homme, son premier livre, le plus important, qui raconte l'horreur de son expérience à Auschwitz. Bouleversant.

Sorti en 1963 en Italie, mais seulement traduit en français en 1988, La trêve est le récit du long voyage qu'ont fait Primo Levi et les autres rescapés d'Auschwitz. En effet, en 1945 lorsque le camp de Buna est déserté par les SS et que les Russes les prennent en charge, les déportés n'imaginent pas que cela leur prendra 9 mois pour revenir dans leur pays d'origine.

A la libération du camp, beaucoup meurent de froid, de faim ou encore de maladie, avant même de pouvoir le quitter. L'Armée Rouge organise ensuite l'évacuation des survivants, d'abord dans un camp de transit, puis les transfère vers l'Est, car la guerre n'est pas finie. Ces transferts sont très mal organisés. Primo Levi et ses camarades d'infortune se sentent ballotés, condamnés à errer en train, parfois à pied ou encore en charrette, sans but réel, dans la campagne russe. Au cours de cette errance, il fait la connaissance parmi les rescapés de personnages extraordinaires qui, pour certains, ne feront que passer, comme Hurbinek, "un enfant de la mort, un enfant d'Auschwitz", quand d'autres aideront Levi à survivre à ce voyage, comme le Grec, homme malin et débrouillard. Ou encore Leonardo, le médecin rencontré à Buna, et Cesare, innocent et naïf. Les portraits que dresse Primo Levi sont forts et transcrivent une incroyable humanité au vu du sujet traité.

Au moment du rapatriement vers l'Italie, ils peuvent s'apercevoir que les Américains comme les Russes ne savent pas trop quoi faire d'eux. La désorganisation règne aussi à l'Ouest : manque d'eau, de nourriture, de chauffage ou de lits. Le retour ne se fait pas dans le confort.

Ce livre se lit comme un roman, même si ce n'est pas de la fiction. On est propulsé dans l'épuisant voyage de Levi, qui le conduit de la Pologne à Turin. Il y redécouvre la vie, la solitude, le besoin de relations humaines, les rires, et même le besoin d'avoir une occupation, un travail qui l'occupe mentalement. La trêve est, comme Si c'est un homme, un témoignage contre le silence qui a suivi le retour des déportés, contre l'indifférence de ceux qui n'ont pas vécu la Shoah. C'est aussi un livre sur l'espoir qui renaît, même si le chemin n'est pas simple, même si l'on ne revient jamais totalement.

Voila ce qu'écrit Primo Levi à la fin de son livre : "Je mis des mois à perdre l'habitude de marcher le regard au sol comme pour chercher quelque chose à manger ou à vite empocher pour l'échanger contre du pain."


Autres livres-témoignage sur la Shoah :
Si c'est un homme de Primo Levi
Le journal d'Hélène Berr
Carnets du ghetto de Varsovie d'Adam Czerniakow,


song "nuit et brouillard" by JEAN FERRAT
la trêve by PRIMO LEVI (Les cahiers Rouges / Grasset)

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